Une femme s'en va-t-en mer
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- 03/12/2015
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Un parcours singulier
"J'aime mon entreprise, j'aime mon métier." C'est d'une voix pleine d'enthousiasme qu'Alexia Lotode évoque son poste dans une entreprise nautique de distribution. Basée à Marseille, celle-ci fournit de grandes marques internationales de matériel mécanique et accessoires pour bateaux. La formation d'Alexia n'a pourtant pas été un long fleuve tranquille. Il lui a d'abord fallu surmonter de grandes difficultés scolaires ressenties jusqu'en 3ème technologique. Cette année-là, une journée de stage au lycée professionnel Rompsay de La Rochelle a joué un rôle décisif : "Je me souviens encore de l'odeur de l'atelier, de l'ambiance entre les apprentis, de l'accueil chaleureux des professeurs. Tout cela a eu un effet immédiat sur moi - j'avais trouvé ma voie!" Alexia intègre alors cet établissement, et décroche successivement un BEP et un baccalauréat professionnel en maintenance de bateaux de plaisance. Elle acquiert ainsi des compétences techniques pointues qui lui permettent de travailler sur divers postes mécaniques en atelier. C'est aussi pendant son BEP qu'elle effectue un mois de stage en Espagne, et un mois en Allemagne.
Alexia décide ensuite de poursuivre ses études par un BTS commerce. Cela lui ouvre d'autres perspectives que le travail manuel, notamment grâce au système d'alternance qui lui permet de se former sur le terrain en entreprise. Partageant son temps entre les cours théoriques et le travail dans une compagnie de vente de voiliers de La Rochelle, elle apprend alors les métiers de commercial et de chef d'atelier. A l'issue de ce beau parcours, elle est embauchée comme technico commerciale et chargée de la gestion du magasin dans une petite structure polyvalente de La Rochelle, puis comme responsable commerciale dans une entreprise similaire à Royan. Alexia se montre ainsi capable de saisir les opportunités et de multiplier les expériences. Cela lui vaudra d'être repérée et recrutée en 2009 par l'entreprise de distribution marseillaise dans laquelle elle exerce encore à ce jour.
Ainsi, à 31 ans, Alexia peut se féliciter d'avoir conquis une place aussi exigeante que gratifiante dans le milieu du nautisme. D'abord responsable technique dans sa nouvelle entreprise rochelaise, elle choisit de partir en Asie durant une année. Elle améliore ainsi de beaucoup sa maîtrise de l'anglais, et s'ouvre à des modes de travail et de pensée différents. A son retour, compte tenu de la richesse de son parcours, et bénéficiant d'une restructuration de l'entreprise, elle devient cadre. Chef de produits et chargée de la liaison avec une centaine de fournisseurs à l'international, Alexia voyage partout dans le monde. Elle est en outre une spécialiste reconnue et demandée. Elle est en effet la seule à ce jour en France à posséder les compétences nécessaires pour installer le joystick Optimus, un système électro-hydraulique révolutionnaire permettant de manoeuvrer les bateaux à 360°.
La mécanique nautique au féminin
L'une des premières jeunes femmes diplômées dans ce secteur quasi exclusivement masculin, Alexia aime rappeler que cela n'a pas été de tout repos. Il lui a fallu relever ce challenge : ne pas se laisser impressionner par une majorité masculine parfois écrasante, et dépasser certains préjugés. Par exemple, elle qui aime beaucoup la mécanique, s'est heurtée à l'idée très répandue que les métiers manuels sont plutôt réservés aux hommes, surtout lorsqu'ils sont très physiques. Alexia a toutefois su, grâce à sa formation solide, trouver un métier qui marie bureau et terrain, à la pointe de la technologie.
Finalement, si le fait d'être une femme a pu parfois lui rendre la tâche plus difficile, Alexia souligne que, faisant preuve d'un travail patient et acharné, elle a en retour bénéficié de l'appui sans faille de ses professeurs. Des personnalités comme Catherine Le Goff, Responsable Formation à la Fédération des Industries Nautiques, l'ont aussi épaulée en l'aidant par exemple à trouver ses stages à l'étranger. Plus tard, voyant qu'elle ne comptait pas ses heures et qu'elle tenait à faire valoir ses compétences techniques, ses patrons aussi, affirme-t-elle, l'ont toujours soutenue en tant que femme. Elle a donc pu obtenir en quelques années la reconnaissance de l'ensemble du milieu. "Nous sommes encore si peu de femmes que tout le monde nous connaît rapidement!" Ce qui était perçu d'abord comme un obstacle est devenu valorisant, grâce à son engagement passionné. Et la jeune femme veille au grain : suivant de près les évolutions du secteur, elle relève une féminisation prometteuse. Elle-même s'efforce d'y contribuer en proposant son aide à toute nouvelle apprentie qu'elle rencontre à Marseille ou dans son ancien lycée de La Rochelle - à bonne entendeuse!