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L’économie du partage à l’abordage du nautisme

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Immobilier, transports, tourisme, échanges marchands… De plus en plus de secteurs sont touchés par l’essor de systèmes collaboratifs comme la location entre particuliers ou le troc de services. Concurrence déloyale ou vivier d’opportunités ? La question se pose alors que ce nouveau modèle semble gagner le monde de la plaisance.

Elle pénètre chaque recoin de notre quotidien et affiche d’importantes valorisations : 1,6 milliard de dollars pour la start-up française de co-voiturage Blablacar, 13 milliards de dollars pour le site de location d’appartement de particulier à particulier Airbnb, 50 milliards pour la compagnie de VTC Uber… En France comme à l’étranger, l’économie collaborative prend de plus en plus d’importance ; des entrepreneurs tentent même, depuis environ trois ans, d’appliquer ce modèle au secteur de la plaisance.

Une poignée de start-up s’est en effet lancée sur le marché du nautisme français. Leur idée ? Mettre en lien les amateurs, expérimentés ou non, à travers des services de location de bateaux entre particuliers, de co-navigation ou de partage de propriété. La formule comprend un paiement sécurisé, un système d’évaluation des utilisateurs et des services annexes, à l’image des principaux sites fondés sur la consommation participative : accompagnement pour trouver le meilleur prix, skipper à la demande, conciergerie, assurance, etc.

On est encore loin encore des chiffres d’Uber ou d’un Airbnb, mais le nombre de bateaux proposés augmente – preuve que le modèle économique est pertinent, avancent ses fondateurs. Cependant, les acteurs traditionnels de la plaisance s’interrogent et souhaitent qu’aucune forme de concurrence déloyale - même reposant sur un flou juridique - ne vienne redistribuer les cartes.

Le fait est que les consommateurs français ont changé. Biberonnée à Internet et avide de nouveauté, une majorité a déjà utilisé des services collaboratifs et n’imagine plus faire sans cette nouvelle économie, indique une étude de l’ObSoCo datant de janvier 2013. Les jeunes d’aujourd’hui, adeptes de « bons plans »,  font primer l’usage sur la propriété, changent régulièrement de lieu de vacances et ne restent plus forcément fidèle à une marque ou un loisir en particulier. Posséder un bateau dans un port précis, où ils devront revenir régulièrement pour la pratique et l’entretien, ne serait pas forcément adapté à leur mode de vie.

L’industrie du nautisme, historiquement fondée sur la propriété et l’économie traditionnelle doit-elle s’adapter pour autant ? Le débat reste ouvert… De récentes initiatives indiquent qu’une conciliation des modèles économiques serait possible, et qu’elle pourrait attirer ce nouveau public.
Aux États-Unis par exemple, l’inscription à des « boat clubs », pour environ 4000 dollars et 200 euros d’abonnement mensuel, donne accès à une flotte répartie sur toutes les côtes du pays. Cette formule, agrémentée d’une relation client conséquente, paraît donner satisfaction au jeune public, tout en permettant aux entreprises du nautisme de travailler directement avec les clubs : par exemple pour tout ce qui touche à la vente et l’entretien de bateaux. On note d’autres initiatives du même ordre ailleurs dans le Monde. D’autres encore ont investi le champ de la propriété partagée. Ces entreprises qui communiquent beaucoup sur les réseaux sociaux mettent en avant des notions telles que la flexibilité, la convivialité ou encore l’appartenance à un groupe socialement valorisant.

En Angleterre également, des entreprises ont multiplié les formules : formations, possibilité de recourir à des skippers, variété des bateaux, etc. En Italie, une entreprise tente d’appliquer ce modèle au marché italien – où la propriété demeure très valorisée – en proposant aux clients de rester le seul détenteur d’un bateau, tout en ayant la possibilité d’accéder à un autre bateau de la communauté. En clair, il ne s’agit pas de copier-coller une formule qui fonctionne quelque part, pour faire fortune ailleurs.  

Des initiatives pourraient également voir le jour en France, mais ne seraient probablement pas viables si tous les acteurs du secteur n’étaient pas sollicités et impliqués – constructeurs, vendeurs, loueurs, équipementiers, etc. Une clarification du cadre légal paraît en outre indispensable à très court terme, prévient Jérôme Heilikman, juriste spécialisé en droit maritime et président de l’association Legisplaisance. « Ne pas légiférer reviendrait à entretenir une concurrence déloyale d’une côté, et de l’autre à freiner une activité nouvelle et prometteuse. Ce serait néfaste pour l’ensemble du secteur. » Une équilibre reste à trouver.

 

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